Sublime

László Papp. Je lui dois mes années de légèreté et de vie gourmande. Je n’ai jamais su si l’histoire d’Ochoa était vraie. S’il avait vraiment refusé la place ou si Papp avait inventé ce conte pour rabattre chez moi d’éventuelles prétentions salariales et m’engager, en tant que second choix, à un salaire dont je m’apercevrais plus tard qu’il était,

Je savais que je ne reverrais pas Aymeric le lendemain, ni probablement les jours suivants, il allait regretter sa confession, il reviendrait le 31 parce que quand même on ne peut pas rien faire le soir du 31, enfin ça m’était déjà arrivé plusieurs fois mais j’étais différent de lui, plus imperméable aux modalités.

— Tu vas beaucoup leur manquer. — La vie est faite de rencontres et de ruptures. — J’espère que tu reviendras nous rendre visite. — Je te le promets, si je passe par ici. — Mais tu ne repasseras pas. — Qui sait ?

On lui serrait la main, on le remerciait, on le trouvait définitivement sympa. Perdu dans cette foule, inconnu parmi les inconnus, il pouvait se réinventer, devenir tout ce qu’il voulait. Les différentes peaux qu’il revêtait lui procuraient le plaisir superbe d’échapper à lui-même.

Ce n’est pas pour dire, mais je voyais bien que je leur faisais de l’effet. Je me suis même emballé et j’arrivais plus à m’arrêter tellement j’avais envie de tout sortir mais là évidemment c’est pas possible parce que je suis pas Monsieur Victor Hugo, je ne suis pas encore équipé pour ça.

Durant les jours suivant, Émile se laissa happer par une routine réjouissante. Réveillé avant les autres, il se rendait au café In Bivaccu pour profiter du calme de la mer. Canem venait s’allonger près de lui tandis que Mateo, après lui avoir servi son expresso, passait un peu de temps à discuter avec celui qu’il surnommait définitivement « Pinzutu