Travailler moins pour vivre mieux - Guide pour une philosophie antiproductiviste : Guide pour une philosophie antiproductiviste (Hors Collection) (French Edition)

L’enjeu de la multi-activité c’est la possibilité pour « l’autonomie des personnes de se développer indépendamment du besoin que les entreprises en ont »13 : actuellement, cette autonomie est requise par certains secteurs de production, pour stimuler la créativité et la productivité des salariés, mais n’est pas valorisée en soi. Pour Gorz, nous som

Il décorrèlerait la protection sociale et la satisfaction des besoins d’une part, de l’emploi et de la productivité effective individuelle d’autre part. Tant que les deux resteront liés, nous serons incités à produire toujours plus pour assurer notre sécurité matérielle.

Tcherneva continue de valoriser l’emploi pour ses fonctions d’insertion sociale et d’épanouissement individuel : elle ne remet en question ni la centralité idéologique du travail ni l’idéologie productiviste qui l’accompagne. Quelles seraient les limites à toujours plus d’emploi public ? La garantie d’emploi continue de soumettre les individus à l’

La centralité idéologique du travail reste impensée : si le travail ne faisait pas souffrir, il serait souhaitable que tout le monde y consacre son existence et s’y épanouisse, mais vu les souffrances actuelles, suggérons peut-être d’améliorer ses conditions d’exercice. Pourquoi ne pas vouer sa vie au travail si sa version améliorée est plus agréab

Le bonheur du travailleur est aussi perçu comme un facteur de productivité : un travailleur épanoui s’investirait mieux dans son organisation, de façon durable. Rendre le travailleur heureux ne serait qu’une technique de management parmi d’autres et non une fin en soi.

Selon l’expression de Nietzsche, le travail est la meilleure des polices : il nous contrôle en nous forçant à rentrer dans le rang d’une place sociale assignée et nous discipline en lissant notre caractère pour faire de nous des soldats obéissants.

Le libéralisme de Locke au XVIIe siècle ou de Smith au XVIIIe siècle valorise le travail comme moyen d’indépendance vis-à-vis des rapports sociaux traditionnels. Il est perçu comme le moyen d’affranchissement des carcans qui pèsent sur l’individu. Par la vente libre de sa force de travail sur le marché de l’emploi, le travailleur gagne son autonomi

Le travail semble donc intrinsèque à la condition humaine : on ne voit pas pourquoi et comment on pourrait s’en passer. Même si le travail est inégalement réparti entre les individus selon leur statut social, il semble impossible que l’humain n’ait plus à travailler du tout. Aucun penseur n’envisage la fameuse « fin du travail » avant la fin du XXe

Mais cela n’implique pas que toutes les contraintes et méthodes d’apprentissage, plus ou moins coercitives, soient légitimes. Foucault a même soupçonné l’école d’être une instance disciplinaire visant à faire accepter les normes sociales nécessaires à l’insertion dans le monde professionnel futur parce qu’elle nous habitue à respecter les horaires,