Ce rapprochement entre la notion de potentiel de la situation et l’esprit inconscient nous entraîne vers de vastes concepts, car encore faudrait-il préciser ce que l’on entend par « esprit » et par « inconscient », ces grands objets de recherche que notre point de vue ontologique nous pousse à appréhender dans une perspective intrapsychique : si

convaincre, serait une erreur qui se traduirait par l’apparition

Dans la logique du but conscient, on conçoit les laps de temps séparant les actions censées nous rapprocher du but comme un temps perdu, ou, comme nous le disons lugubrement : un temps mort. Dans la logique chinoise, ce temps est loin d’être mort : il est celui pendant lequel du potentiel s’accumule, le temps de la maturation.

Pour mémoire, une tentative de solution est un effort volontaire et conscient consenti pour régler un problème.

Cette inversion, ce mouvement de bascule qui sous-tend toute la thérapie, ce passage délicat du thème des tentatives de solution au thème thérapeutique, peut être lu comme le passage d’un mode de régulation par l’action, avec ce qu’elle implique de forçage, de volonté, et d’intentionnalité, à son inverse, à savoir une régulation, involontaire, non

Le problème, répondrais-je alors, est que là où nous pensons action, les Chinois pensent transformation. L’action comme nous la concevons, la maîtrise du cours des choses, l’imposition de notre volonté au Procès, la lutte contre la nature, est pure folie pour le taoïste. Pour lui, l’action relève toujours du forçage : elle ne peut que perturber le

Or de cette différence, on pourrait tirer une alternative pour la conduite : […] au lieu donc de fixer un but à son action, se laisser porter par la propension (du cours des choses), bref, au lieu d’imposer un plan au monde, s’appuyer sur le potentiel de la situation. »8

J’incline d’ailleurs à penser que François Jullien a intitulé, pour cette raison, l’ouvrage qu’il appuie le plus solidement sur le Laozi : Le traité de l’efficacité. On pourrait presque considérer ce titre comme une traduction, ou une paraphrase qui chercherait à s’approcher au plus près du sens de Dao De Jing.

Les milans sont dans le non-agir, me dis-je alors. Ils utilisent le potentiel de la situation pour atteindre leur but, avec un minimum d’agir pour une efficacité maximale.