j’ai beaucoup parlé de deux montagnes. Je l’ai dit, il s’agissait de restituer sous forme narrative le contraste entre deux conceptions morales du monde. La première montagne représente le point de vue individualiste, celui qui place les désirs du moi au centre. La deuxième montagne est ce que l’on pourrait appeler la vision du monde

Si j’ai écrit ce livre, c’est en partie pour me rappeler le type de vie que je veux vivre. Nous, écrivains, réfléchissons à notre propre existence sous le regard du public, même quand nous faisons semblant d’écrire à propos d’autrui. En d’autres termes, on s’efforce d’enseigner ce qu’on aurait surtout besoin d’apprendre soi-même.

Lorsque suffisamment d’individus traversent cette phase ensemble, cela finit par donner une société où tout est en évolution constante. C’est ce que le philosophe polonais Zygmunt Bauman appelle la « modernité liquide ». À l’ère du Smartphone, entamer ou clore une transaction ou une relation possède un coût frictionnel proche de zéro.

La foi, c’est moins de vivre constamment dans cette dimension supplémentaire de profondeur que de l’apercevoir, puis d’aspirer à la retrouver. Ceux qui adhèrent à cette vision de la foi, la décrivent non pas comme une compréhension permanente, mais comme une sorte de désir, ou peut-être une intuition. Cela consiste moins à connaître Dieu dans tous

L’augmentation des cas de dépression et de troubles mentaux est également le corollaire de cet isolement social. On disait naguère que la dépression et les troubles mentaux étaient essentiellement dus à un déséquilibre dans la chimie du cerveau. Mais comme l’explique Jonathan Hari dans son livre Lost Connections, ces problèmes de santé mentale

nous voyons que l’amour attentionné n’est pas un phénomène marginal de la société. Il en est le fondement. Ces bâtisseurs de communauté sont avant tout animés par les désirs des catégories quatre à six – des motivations émotionnelles, spirituelles et morales : le désir de vivre en lien étroit avec les autres, de changer les choses, de se sentir en

Le point de vue relationnaliste n’est pas une affaire de forces du bien triomphant des forces du mal. C’est toujours une concurrence entre des vérités partielles. C’est toujours une conversation évolutive, entre le moi et la société. Il s’agit toujours d’équilibrer les tensions et d’essayer de mener sa vie dans un élégant équilibre.

Dans Dieu en quête de l’homme, le rabbin Heschel écrit : « L’émerveillement est la caractéristique essentielle de l’attitude de l’homme religieux devant l’histoire et la nature. Le fait de tenir les choses pour certaines et de considérer les événements qui surviennent comme le cours naturel des choses est aux antipodes de cet esprit9. » Il y a des

Sur la première montagne, l’accent est mis sur le moi libéré, la réussite individuelle, la création d’une société où chacun est libre d’être lui-même. C’est une société fluide, et à court terme une société productive, mais c’est une société sans grande épaisseur. C’est une société dans laquelle les gens ne sont que superficiellement liés les uns