Éloge de l'oisiveté (La Petite Collection) (French Edition)

Nous les semons : une seule en fait éclore plusieurs, sans compter les délais que nous nous accordons. « Quand j’aurai mis fin à ceci, j’étudierai de toute mon âme ; si j’arrive à régler cette fâcheuse affaire, je m’adonnerai à la philosophie. » Ce n’est pas pour les jours de loisir qu’il faut réserver la philosophie. Négligeons tout le reste pour

Ajoutons que de tous ces hommes qui ont des fonctions dans l’État nul ne considère qui il surpasse, mais par qui il est surpassé ; ils sont moins flattés de laisser mille rivaux derrière eux que rongés d’en voir un seul qui les précède. C’est le vice de toute ambition de ne point regarder derrière elle. Et ce n’est pas l’ambition seule qui ne s’arr

Sénèque dénonce toutefois systématiquement l’excès d’activité, l’occupatio, qui absorbe toute l’existence et hypothèque le bonheur. Bien des individus sont sans cesse affairés, asservis par des occupations vaines : telle est la folie des hommes qui consacrent leur vie à des futilités et à des distractions jusqu’à s’en rendre esclaves.

Si l’oisif ne jouit plus aujourd’hui de l’estime de ses contemporains, s’il est plus volontiers qualifié de parasite que d’esprit libre, profond et méditatif, c’est que le temps a considérablement transformé

le délassement et l’inaction en premier lieu, est d’abord conçu comme contraire aux valeurs de la belle cité grecque, toutes orientées vers l’action et l’investissement personnel dans la vie sociale.

À l’opposé, la vie authentique est celle du loisir authentique. Pour y parvenir, un seul moyen : la retraite, autrement dit le retour à soi et à l’étude de la nature pour mieux se comprendre et le monde avec soi. Il convient au sage de se retrancher dans sa citadelle3

À distance du tumulte on peut méditer sur la société humaine et espérer, par exemple, lui administrer un remède.

Pour autant, on aurait tort de considérer le loisir comme une inactivité. Loin d’être un farniente, le loisir méditatif, tel qu’il est valorisé, consiste non en une activité du corps, comme celle du soldat en conquête, mais en une activité de l’esprit,

Mais est-ce bien tel ou tel lieu qui contribue beaucoup à la tranquillité ? L’âme seule donne à toutes choses le prix qu’elles ont pour elle. J’ai vu de délicieuses campagnes habitées par des cœurs chagrins. J’ai vu en pleine solitude le même trouble que chez les gens les plus affairés. Garde-toi donc de penser que si ton âme n’est point entièremen