Sublime

Mars 1875. C’en était donc fait. Rimbaud se délestait du dernier poids qui le retenait au monde littéraire. Désormais, il volerait d’autres ailes, laissant à Verlaine, Nouveau ou Sivry celles d’un Icare brûlé aux feux d’un dangereux soleil.

Rimbaud

Rien, sinon la vérification sévère qu’il n’est plus là. Rimbaud de son vivant s’est interrogé sur la validité de sa présence, pour constater d’ailleurs qu’elle était peut-être invisible, en dépit des scandales qu’il provoquait, des regards curieux qui le suivaient.

Rimbaud n’écrit point pour lui seul. Il tient à se faire connaître – ce qui lui est une manière de vivre.

Rimbaud se résout à pratiquer quelques coupes et, le 2 janvier 1870, il a le plaisir de se voir publié, – un événement dont Mme Rimbaud elle-même ne put que se réjouir. Arthur le fort en thème s’aperçoit donc qu’il n’est pas si difficile d’entrer dans la carrière des lettres pour peu qu’il sache frapper aux bonnes portes et solliciter.

Passé ce temps et le dérisoire poème Rêve rimé par moquerie, Rimbaud ne croit plus à la littérature. Il délaisse cette « pratique » pour d’autres, plus efficaces, lui permettant d’être « absolument moderne ». L’histoire de son corps et de son esprit devenus autres correspond à l’image qu’il se fait de la modernité. En ce sens, il fabrique un style

Rimbaud, peu soucieux des poursuites qu’il risquait de provoquer, répondait à ce profond appel du voyage qui le sollicitera désormais sa vie durant. L’ailleurs prend forme, lui souffle au visage. « Mais que salubre est le vent ! » dira-t-il plus tard. Que cherche-t-il ? Fuir ? Mais aussi bien atteindre. Être en marche pour une destination inconnue

Rimbaud, prêt à l’aborder, se déroba. Il montrait bien là sa timidité, doublure toujours présente de sa révolte et de son goût du scandale.

Par bonheur, son univers ne se réduisait pas aux quatre murs d’une chambre, aux rues de Charleville ; il trouvait à se déployer dans chaque livre ouvert. Rimbaud prenait son bien un peu partout : journaux, magazines, illustrés, feuilletons. Pour répliquer à l’ennui de la ville, alors qu’il commence à peine à lire et à écrire, il invente des bribes