Une étrange victoire: L'extrême droite contre la politique (French Edition)

Durant les Trente Glorieuses, le souvenir des trahisons d’une grande partie de l’extrême droite française sous l’Occupation contribuait à la cantonner aux marges du champ politique. Contrairement à ce qui se dit souvent, cette mémoire n’était pas seulement de nature morale. Elle ne portait pas initialement sur les crimes de la collaboration et la r

C’est là, justement, que réside l’étrangeté. Un parti qui prétend au pouvoir n’est pas interrogé sur ce qu’il fera une fois qu’il y aura accédé.

Dans un tel contexte, la dédiabolisation du Rassemblement national n’est jamais que l’effet d’une réinterprétation profonde de ce que « diabolique » veut dire en politique.

Le Front national des trente premières années, celui de Le Pen père, parlait sans trop d’artifices. Bien sûr, il ne disait pas tout et surtout pas tout le temps. Il choisissait ses moments, et parfois laissait échapper une phrase au détour d’un entretien. Mais quand on relit les textes, quand on réécoute les discours, on ne peut qu’être frappé par

Ces reconfigurations du discours autour de menaces existentielles protéiformes font de toutes politiques des politiques de la survie où le clivage de l’ami et de l’ennemi l’emporte sur tous les autres. C’est la fonction d’un tel appel : en nommant une menace existentielle, le locuteur cherche à susciter un désir de protection immédiat.

Revenons sur les niches parlementaires du parti d’extrême droite. Ce qui rend étranges ses propositions de loi, c’est qu’elles mêlent une hostilité de principe à l’immigration désormais partagée par d’autres à des mesures marquées au coin de la morale. Mener l’enquête sur le corps des enfants étrangers afin de pouvoir expulser ceux qui sont majeurs

Le « détail », les calembours douteux et l’apologie de l’« inégalité des races » servaient aussi à cela : faire du bruit pour empêcher, en interne, les éventuelles voix discordantes d’être audibles.

Une précision s’impose à ce stade. Certes, l’extrême droite n’a pas besoin d’imposer toutes ses idées, de construire une hégémonie culturelle, pour arriver au pouvoir. Mais une fois en responsabilités, elle ne renie pas cette pratique. Meloni l’a bien compris, qui affirme vouloir « cambiare la narrazione », c’est-à-dire changer le récit dominant. S

La promesse de revanche est bien une promesse de justice.