Lettres à Lucilius (La Petite Collection) (French Edition)

Le premier indice d'une âme bien équilibrée est, selon moi, de savoir se fixer et séjourner avec soi.

Tu dis : « Mais j'aime feuilleter tantôt l'un, tantôt l'autre. » Goûter un peu de tout est le fait d'un estomac affadi ; ils ne nourrissent pas, ces divers aliments qui se combattent et qui l'encrassent. Lis donc régulièrement les livres les plus estimés, et si parfois tu en parcours d'autres distraitement, par fantaisie, reviens vite aux premiers.

Que tous les bruits du monde s'élèvent à l'extérieur, pourvu qu'en moi aucun tumulte ne se produise, que le désir et la crainte ne s'y combattent pas, que l'avarice et le goût du faste n'y viennent point se quereller et se malmener l'un l'autre. À quoi bon le silence de tout un quartier si j'entends encore frémir mes passions as? 6. « Il est nuit :

Nous avons côtoyé la vie, Lucilius; et de même que sur mer, comme dit notre Virgile, « on voit la terre et les cités s'enfuir » ay, ainsi, dans cette course si rapide du temps, s'efface d'abord notre enfance puis notre adolescence puis, peu importe comme on l'appelle, la saison intermédiaire du jeune homme au vieillard, frontière des deux âges; pui

La Nature désire bien peu, l'opinion voudrait toujours plus, l'infini. Que

n'imite point ces hommes moins curieux de faire des progrès que de faire parler d'eux.

Cette maxime : « Le sage se suffit », est le plus souvent mal interprétée, mon cher Lucilius ; les hommes repoussent de partout le sage et l'emprisonnent dans sa propre peau. Or il faut bien pénétrer le sens et la portée de ce que cette maxime promet. Le sage se suffit quant au bonheur, mais non quant à la vie elle-même. Celle-ci a de nombreux beso

Rien au monde n'est plus nécessaire à méditer que cette question du départ; car pour les autres épreuves, on s'y aguerrit peut-être en pure perte. Nous aurons préparé notre âme à la pauvreté ; et nos richesses nous seront restées. Nous l'aurons armée de mépris contre la douleur ; et, grâce à une santé ferme et inaltérable, jamais l'essai de cette v

Ce qu'il faisait par dépravation, faisons-le dans la paix de l'âme; et, au moment de nous coucher, disons, satisfaits et joyeux : « J'ai vécu, jusqu'au bout j'ai parcouru l'étendue que m'avait assignée le destin. » ae Si le dieu nous accorde un lendemain, soyons heureux de le recevoir. On jouit pleinement et avec sécurité de soi-même lorsqu'on atte